Dans le numéro 466 du samedi 16
février 1946, le quotidien L’Aurore
titre : "Après M. Tillon, M. Michelet Un luxueux hôtel
réquisitionné rue François 1er "
Suit un article au ton cinglant
détaillant le déménagement de la famille de M. Michelet du Ministère de la
Marine vers cet hôtel particulier.
Pourquoi cet article ?
Pourquoi ce ton ?
Nous sommes au début de 1946.
Edmond Michelet, M.R.P., est ministre des armées du nouveau gouvernement provisoire présidé par Félix Gouin. Le 20 janvier 1946, le général de Gaulle, président du précédent gouvernement provisoire a démissionné. Edmond Michelet, qui a été son ministre
des armées depuis le 21 novembre 1945, assisté pour l’armement du communiste
Charles Tillon, est reconduit dans ses fonctions au sein du nouveau
gouvernement. Ce gouvernement tripartite (M.R.P., socialistes, communistes - les radicaux-socialistes ne participent pas au gouvernement)),
tout comme le précédent, manque de cohérence, traversé qu'il est par les
querelles entre partis, et est largement frappé d’impuissance devant la
situation catastrophique du pays : crise financière, problèmes aigus de
logement, de ravitaillement, de fourniture de combustible de chauffage et
d’électricité, etc. Le parti communiste, bien qu'au gouvernement, souffle sur
les braises. Il n’est pas le seul.
La question de la définition du
rôle, de la composition (armée de conscription – armée de métier) et du format
de l’armée française (effectifs) est posée. Le 31
décembre 1945, lors du vote du budget, un amendement, au nom du parti socialiste, de M. Capdeville relayé par André Philip, tend à
réduire ses crédits de 20%. Un compromis est trouvé mais c’est la goutte d'eau
qui fait déborder le vase De Gaulle : il démissionne après une retraite
dans le sud de la France. L’armée est sous le feu de la presse qui dénonce
son train de vie : immeubles et véhicules réquisitionnés, effectifs
pléthoriques, officiers menant grande vie en Allemagne occupée, intendance
généreusement pourvue…
C’est dans ce contexte que le
déménagement de M. Michelet intervient.
Claude Michelet, le dernier fils
d’Edmond Michelet a raconté avec un certain bonheur quelques épisodes des
séjours de sa famille au Ministère de la Marine puis dans l’hôtel particulier
de la rue François 1er dans son livre intitulé "Une fois sept" – il avait alors 7/8 ans
L’Aurore, alors de tendance
radical-socialiste, est dirigée par Paul Bastid. Celui-ci, normalien, a été élu
à 32 ans député du Cantal. Il l’est resté sans interruption jusqu'à la guerre.
Résistant et membre du Conseil National de la Résistance en 1943, il est membre
de l’Assemblée Consultative provisoire en 1944-45 et est élu à la deuxième
Assemblée constituante en juin 1946. En février 1946, il n’est donc pas député
et combat fermement le tripartisme, cause de l’impuissance du gouvernement.
Dominique Pado, de son vrai nom
Dominique Padovani, est, en 1946, un très jeune journaliste de 24 ans. En 1967,
il devient sénateur et le restera jusqu'à sa mort en 1989.
A noter qu'en 2005, à la suite
d’une campagne de presse, Hervé Gaymard démissionne de son poste de Ministre de
l’économie et des finances du gouvernement Raffarin. Il occupait un appartement
en duplex de 600 m², rue Jean Goujon (qui – hasard de la géographie – coupe la rue François 1er)
dans le 8ème arrondissement de Paris, dont le loyer mensuel de 14000
euros était réglé par l’Etat.
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